Les cloches de Gembloux sonnent pour le personnel soignant … et les autres (25)

Mercredi 15 avril. Les cloches 2, 4 et 5 sonneront, soit mi-la-si ou quarte et quinte. Ce motif est utilisé pour annoncer la messe du dimanche soir.

Mais au fait, c’est quoi, un beffroi ?

Quand une parle de beffroi, on identifie souvent une tour contenant des cloches et éventuellement une horloge. L’édifice peut être indépendant ou adjoint à un autre bâtiment.
La notion première de beffroi ne concerne en fait pas l’édifice, mais son contenu. Le beffroi, c’est la charpente qui reçoit les cloches. On l’appelle aussi bâti. Il se peut que le beffroi ne soit abrité par aucun édifice. C’est donc par extension que le contenant a fini par prendre le nom de ce qu’il contient.

Les beffrois sont parfois en eux-mêmes des chefs d’œuvres patrimoniaux, fruits du travail des artisans. D’imposantes structures en bois prenant corps parfois dès les niveaux les plus bas des tours et s’élevant à l’intérieur pour recevoir les cloches en hauteur. Ces structures sont dessinées pour absorber une bonne partie des vibrations créées par la mise en branle des cloches pour éviter de les transmettre aux murs. Ceux-ci pourraient ne pas résister.

A Gembloux, l’incendie de 1905 fut fatal à l’ancienne structure. En 1907, les cinq cloches furent installées dans deux beffrois en bois, le premier recevait le bourdon et les 2 plus grosses cloches au dernier niveau de la tour. Le second, placé au pied de la flèche, accueillait les deux plus petites cloches, Guibert et Benoît.

Après-guerre, les cloches furent toutes suspendues dans des structures métalliques, y compris les jougs. Au pied de la flèche, le beffroi en bois fut conservé, vide. Il n’attendait qu’à retrouver de nouvelles cloches et c’est en 2013 qu’on y plaça Romane et Benjamine.

Il y a un an aujourd’hui, Notre-Dame de Paris était la proie des flammes. Son bourdon de 13 tonnes est suspendu dans un magnifique beffroi de bois qui fut épargné.

Illustrations : Encyclopédie de Diderot et d’Alembert, 1751-1772, extrait repris dans Jean-Pierre Rama, Cloches de France et d’ailleurs, Pierre Zech Éditeur, Paris, 1993. La grosse cloche dans le beffroi métallique et la cloche Guibert avec, devant elle, l’ancien beffroi en bois, encore vide en 2010 : Vincent Dusseigne. Romane et Benjamine placée dans l’ancien beffroi en bois : collection privée – article : Manu Delsaute

Les cloches de Gembloux sonnent pour le personnel soignant … et les autres (24)

Mardi 14 avril. Sonnerie de quatre cloches ce soir, les plus hautes : 3-4-5-6 ou fa#-la-si-do#. Le fa#, distant d’une tierce mineure ou trois demi-tons, se détache bien des autres.

L’heure H !

Nous avons tous vécu la situation où nous entendons sonner l’heure mais nous nous perdons dans le compte par distraction ou à cause du bruit ambiant. En l’absence de cadrans et d’aiguilles, comment se repérer ? Comment ne pas rater le premier coup qui sera essentiel pour compter ? Il faudrait paradoxalement savoir à quel moment l’heure nous sera annoncée… pour y être attentifs !

On a alors pensé à une solution permettant de nous prévenir de la sonnerie imminente de l’heure.

Comment ? En reliant au mécanisme de l’horloge un système d’alerte qui produira des tintements caractéristiques sur une ou plusieurs cloches. Leur retentissement nous invite à prêter attention à l’heure qui va sonner et à compter les coups.

Exemple basique : une sonnerie sur deux cloches « bim-bam ». Une fois au quart d’heure, deux fois à la demi-heure, trois fois aux trois quarts puis quatre fois à l’heure, suivies d’un nombre de coups correspondant à l’heure qu’il est. On en a une illustration à Grand-Leez, sauf que c’est « bam-bim » ! Exemple un peu plus développé : celui de Big Ben où la mélodie est découpée et ne sera jouée complètement qu’à l’heure pile.

Illustration : Dessins pour le remplacement de la flèche du beffroi en 1905. Archives communales de Gembloux – article Manu Delsaute 

Les cloches de Gembloux sonnent pour le personnel soignant … et les autres (23)

Lundi 13 avril. Sonnerie de trois cloches : 2-3-4 ou mi-fa#-la. Bel accord.

Un des services rendus par les cloches est de donner l’heure. Une fonction importante à l’époque où rares étaient les horloges miniatures et ceux qui pouvaient se les payer.

Le système de l’horloge de clocher est comparable à celui des horloges domestiques qui apparaîtront plus tard avec des poids à remonter régulièrement et, généralement, un balancier. Mais tout est plus grand ! Ce mécanisme, qui fait tic-tac aussi, ressemble à une cage remplie d’engrenages et autres pièces métalliques. Il est relié à des marteaux qui frapperont les cloches pour indiquer l’heure. Plus la tour est haute, plus on dispose de longueur de corde et moins souvent il faut remonter les poids.

A Gembloux, on retrouve des mentions de l’horloge et de la tour de l’horloge dès le XVe siècle. Le gardien de l’horloge devait veiller à son bon fonctionnement et au remontage des poids. C’était une responsabilité importante qui, sous l’Ancien Régime, était confiée par l’abbé contre rémunération.

En 1860, le Conseil communal désigna le commissaire de police pour accomplir cette tâche quotidienne. Après la Seconde Guerre mondiale, des moteurs le feront de manière automatique. Ensuite, le système mécanique a laissé place à l’électronique. Il ne nous en reste que les poids et quelques débris. L’horloge est à présent synchronisée par ondes radio avec l’horloge atomique de Frankfort. L’église de Bossière possède encore son ancienne horloge, restaurée et exposée.

Initialement, il n’y avait pas de cadrans et l’heure était uniquement annoncée avec les cloches. Les cadrans ne seront ajoutés au beffroi qu’à la fin du XIXe siècle et seulement pour les côtés sud et ouest. Ils sont cerclés de pierre bleue. Les deux autres cadrans, sans cerclage, seront placés en 1954.


Pour  une question d’esthétique, lorsque les cadrans présentent des chiffres romains, le 4 est écrit IIII au lieu de IV. Ceci permet d’équilibrer les signes : dans le premier tiers, il y aura toujours le I, dans le second, toujours et le V et dans le dernier, toujours le X.

Illustrations : Le beffroi sans cadrans à la fin du XIXe siècle puis avec deux cadrans : collection privée. Photo des cadrans est et nord : Guy Focant pour la Région wallonne, photo de l’ancienne horloge de Bossière et des poids de celle de Gembloux : Vincent Dusseigne – article Manu Delsaute 

Les cloches de Gembloux sonnent pour le personnel soignant … et les autres (22)

Dimanche 12 avril. Retour à plus de sobriété pour ce soir de Pâques : Marie et Benoît souligneront nos applaudissements. 1-4, ré-la ou intervalle de quinte.

Le choix de la cloche à sonner ou de la combinaison des cloches permet de colorer le message que l’on veut passer. On met l’accent sur le ton ou l’intervalle musical, l’accord. Mais la manière de sonner, le rythme et le tempo, sont tout aussi importants pour donner de l’expression.

Voici les principales manières de sonner :

– Le tintement : la cloche est immobile et un marteau, très souvent externe, vient la frapper. Le meilleur exemple est la sonnerie des heures. Ça permet de contrôler pleinement le nombre de coups sonnés, ce qui est préférable pour indiquer le temps… Un tintement rapide sur une petite cloche et c’est le tocsin qui annonce de manière nerveuse un danger comme un incendie. Un tintement lent, sur une ou plusieurs cloches, sonne tristement le glas pour un décès. Le choix des cloches permet même d’annoncer différemment la mort d’une femme, d’un homme ou d’un enfant.

– Le tintement peut être effectué au moyen du battant de la cloche qu’on vient frapper sur celle-ci. On parle alors de copter la cloche.

– La volée : c’est le mode le plus sonore. La cloche et sa suspension sont balancées jusqu’à ce que le battant et la cloche se rencontrent. Le battant doit frapper à l’endroit le plus épais, c’est-à-dire le bord. Le soir à 20h, nous écoutons les cloches sonnant à la volée. C’est aussi ce mode qui est traditionnellement utilisé pour l’annonce des messes ou des réjouissances.

– L’angélus combine les deux modes : 3 x 3 coups tintés puis une volée. Au beffroi, l’angélus sonne tous les jours sauf le dimanche matin à 8h45, 12h15 et 19h15, après les ritournelles du carillon. Les tintements sur la grosse cloche et la volée par la cloche Guibert sauf le dimanche midi où celle-ci est remplacée par la cloche Joseph. A l’église, l’angélus sonne sur l’unique cloche à 8h00, 12h00 et 19h00, après la sonnerie des heures.

Illustrations : La sonnerie des cloches, le jour de Pâques, à la Giralda de Séville, dans Jean-Pierre Rama, Cloches de France et d’ailleurs, Pierre Zech Éditeur, Paris, 1993, p. 137 et dessin d’André Mohimont un jour de marché ou de braderie, 1980 – article Manu Delsaute

Les cloches de Gembloux sonnent pour le personnel soignant … et les autres (21)

Samedi 11 avril. Les cloches sonneront toutes en chœur ce soir à leur retour de Rome. Elles le feront aussi demain à 12h, précédées par quelques mélodies apéritives dès 11h30.

C’est le moment de présenter la cloche de l’église qui vient joindre sa voix à la sonnerie du beffroi car elle a été étudiée pour la compléter.

Elle est en effet issue de l’opération de 2012 et a été coulée à Gembloux par le fondeur André Voegelé. Elle présente les mêmes frises d’épis de blé que Romane et Benjamine. Il s’agit d’un mi d’environ 120 kg pour 60 cm de diamètre, une octave au-dessus de la cloche Joseph du beffroi. Il permet d’étendre la sonnerie du beffroi en ajoutant une note plus aigüe.

La cloche culmine depuis début 2013 dans le lanternon situé tout en haut du clocher de l’église, c’est pourquoi nous pouvons bien l’entendre mais aussi la voir. Elle est dédiée à saint Pierre, comme l’ancienne abbaye dont les bâtiments ont été entièrement reconstruits quelque 250 ans plus tôt. La majeure partie de ceux-ci sont dus au célèbre architecte Laurent-Benoît Dewez. Ce sont ces bâtiments que nous connaissons encore aujourd’hui.

Outre une très belle effigie de saint Pierre, la cloche porte l’inscription suivante, très à propos (sic) :

JE M’APPELLE PIERRE
250 ANS APRES LA RECONSTRUCTION
PAR L’ARCHITECTE LAURENT-BENOIT DEWEZ
DE L’ABBAYE QUE FONDA SAINT GUILBERT
JE CHANTE DU SOMMET DE SON EGLISE
(A) LA MÉMOIRE DU PREMIER DES APOTRES A QUI ELLE ÉTAIT DEDIEE

Illustrations : La montée de la cloche au sommet de l’église et vue de celle-ci avec son marteau externe. Collection privée – article Manu Delsaute

Les cloches de Gembloux sonnent pour le personnel soignant … et les autres (20)

Remarque : Comme précisé hier, les cloches sonneront toujours à 20h parce que le beffroi ce sont aussi des sonneries civiles. Toutes les sonneries religieuses sont suspendues jusqu’à demain soir

Vendredi 10 avril. Après la grande sonnerie d’hier, reprenons où nous en étions mercredi avec deux cloches, mais creusons l’écart pour entendre Guibert et Benjamine, soit une quinte fa#-do#.

Un peu de vocabulaire campanaire au programme d’aujourd’hui. Il nous sera bien utile après.

Tout d’abord, campanaire signifie « qui a trait aux cloches » et, par extension, aux carillons et horloges monumentales.

La partie la plus large de la cloche, à l’endroit où le diamètre est le plus important, est appelée la pince. Un peu plus haut se trouve la partie la plus épaisse. On l’appelle le bord. On remonte vers la robe pour arriver au cerveau, l’endroit où la cloche se referme. Ce cerveau peut être surmonté d’anses ou d’oreilles qui forment la couronne.

Sous le cerveau, à l’intérieur, se trouve une attache nommée bélière pour accrocher le battant, sorte de marteau.

La cloche est suspendue à une pièce de bois ou de métal appelée joug, ou mouton, ou encore monture ou tout simplement suspension. Cette pièce sera mobile si la cloche est destinée à sonner à la volée, c’est-à-dire par balancement.
A l’extérieur de la cloche, on peut retrouver un marteau également.

Tous ces éléments sont fabriqués et entretenus par des artisans qu’on appelle campanistes. Ils ont l’habitude de fréquenter les clochers, endroits souvent peu accessibles. Ils y laissent parfois leur marque, comme dans la grosse cloche de notre beffroi. C’est sur celle-ci qu’un marteau extérieur frappe les heures.

Illustrations : Schéma simplifié issu de Cloches de France et d’ailleurs, Jean-Pierre Rama, 1993. Intérieur de la grosse cloche avec son inscription et son battant, ainsi que le marteau externe : photo de Vincent Dusseigne – article Manu Delsaute 

Les cloches de Gembloux sonnent pour le personnel soignant … et les autres (19)

Jeudi 9 avril. Sonnerie particulière ce soir. L’Église a pour tradition de sonner toutes les cloches le Jeudi Saint pour signifier leur départ à Rome, dont elles reviendront à Pâques. Toutes les cloches sonneront donc, non seulement celles du beffroi, mais aussi la cloche de l’église. Ça fait 7.

Comme chaque année à pareille époque, il n’y a aura donc pas de sonneries religieuses entre ce jeudi soir et samedi soir, moment de la veillée pascale. Plus d’angélus et pas d’annonce des offices, uniquement les ritournelles et sonneries liées à l’horloge publique.

La cloche de l’église, elle, restera muette.

Traditionnellement, les sonneries du Jeudi Saint et de la veillée pascale ont lieu au moment du Gloria, pendant les offices. Compte tenu de la pandémie, il n’y aura pas d’office et elles retentiront à 20h.

Le rendez-vous de vendredi pour accompagner les applaudissements de circonstance en raison de la pandémie aura bien entendu lieu, il n’est pas de nature religieuse.
Toutes les cloches sonneront à nouveau samedi à 20h et également dimanche à 12h00 pour annoncer Pâques.

A Gembloux, les cloches rendent service à tout le monde depuis le Moyen-Âge !

Illustration : Panorama avec le beffroi sans flèche et sans voix après l’incendie de 1905. Extrait d’une carte postale – article Manu Delsaute 

Les cloches de Gembloux sonnent pour le personnel soignant … et les autres (18)

Mercredi 8 avril. En attendant une sonnerie exceptionnelle pour demain, deux cloches pour ce soir, intervalle de quarte comme hier, mais plus haut : Guibert et Romane, soit fa#-si.

Les deux clochers…

Malgré les liens étroits entre la ville et l’abbaye, la vie monastique requiert calme et quiétude, hors de la place publique. L’essor de la ville et la précarité des premières constructions de l’abbaye vont rapidement pousser les moines à se munir de quartiers particuliers.

Dès le Xe siècle, Olbert, 4e abbé de Gembloux, décide d’entreprendre une vaste reconstruction de l’abbaye. L’église initiale est laissée à la paroisse et les moines érigent leurs bâtiments juste à côté, dont une nouvelle église abbatiale, bien plus grande et munie d’une forte tour.

Ces bâtiments abbatiaux, à force de réparations et reconstructions, traverseront l’histoire jusqu’au XVIIIe siècle où on entreprit de tout reconstruire suivant d’autres plans. L’abbatiale d’Olbert se trouvait là où figure à présent le bâtiment de chimie de la Faculté.

Le visage de Gembloux présenta donc, du Moyen-Âge au XVIIIe siècle, deux églises munies chacune de leur tour à la pointe de l’éperon rocheux. L’emplacement était stratégique.
De l’abbatiale d’Olbert et de l’église paroissiale Saint-Sauveur, nous n’avons pas de photo mais bien quelques représentations.

Hormis la tour de la seconde, il ne reste de vestiges qu’enfouis dans le sol.

Olbert, en plus d’être sensible à la cause des plus faibles, restaura la discipline et enrichit la bibliothèque, ce qui mena à l’âge d’or intellectuel de l’abbaye. Il fut également abbé de Saint-Jacques à Liège où il mourut en 1048. Rien d’étonnant à ce qu’une avenue porte son nom.

Illustrations : L’église Saint-Sauveur et l’abbaye au XVIIe siècle, extrait d’une gravure d’Harrewijn ; Dessin d’après ceux commandés par l’abbé Papin au XVIe siècle, dans Léon Namèche, La ville et le comté de Gembloux, Duculot, seconde édition, 1964, p. 345 ; Entre le beffroi et l’église actuelle, le bâtiment de chimie occupe l’emplacement de l’ancienne abbatiale d’Olbert (photo prise entre 1936 et 1954), collection privée – article Manu Delsaute 

Les cloches de Gembloux sonnent pour le personnel soignant … et les autres (17)

Mardi 7 avril. Deux cloches au programme de ce soir : Joseph et Benoît, soit une quarte mi-la.

Cette semaine sainte qui se terminera par Pâques est l’occasion de revenir sur le lien historique de la Ville avec l’abbaye, des rapports entre le civil, temporel, et le spirituel qui sont encore illustrés de nos jours par les cloches dont la Ville partage l’usage avec la paroisse.

A Gembloux, qui détient historiquement le pouvoir et comment est organisée la vie locale ?

Dès sa fondation, l’abbaye de Gembloux s’est vue doter d’importantes propriétés et reconnaître de nombreux privilèges, notamment par ce qu’on appelle la charte d’Otton. Les moines prirent soin de faire confirmer à plusieurs reprises ce diplôme aux origines controversées tant il était profitable à Gembloux en termes d’autonomie et d’exemption de taxes.

C’est donc l’abbé, seigneur de la Terre de Gembloux, qui détient le pouvoir. La charte lui octroie des prérogatives que seuls les comtes possèdent, et même davantage. Il siège d’ailleurs comme premier noble aux états de Brabant, sorte de parlement, et non parmi les membres du clergé. Au XVIe siècle, les choses sont reconnues et la Terre de Gembloux est érigée en Comté. L’abbé est abbé-comte.

Voici qui nous en dit plus sur quatre noms de rue…

L’abbé exerce la justice à travers des échevins et un maïeur, ce dernier devant veiller aux poursuites et à l’exécution des peines. Le maïeur, ou bailli, est aussi chargé de l’administration générale du domaine. Un bourguemaître est préposé à l’entretien des routes et au maintien de la propreté et de la sécurité. Tout ce petit monde est désigné par l’abbé et révocable par lui à tout instant.

Une forme de consultation de la population est organisée sur certaines grandes questions, l’exploitation du domaine procure de l’emploi, les plus nécessiteux sont épaulés, notamment par la table des pauvres.

Les privilèges et le mode de fonctionnement semblaient convenir à la plupart. Ceci explique probablement pourquoi nulle opposition digne de ce nom ne se soit organisée pour contester les choses. A l’arrivée des révolutionnaires français, ceux-ci furent d’ailleurs plutôt repoussés jusqu’à ce qu’ils parviennent à s’imposer et implanter les bases du fonctionnement local que nous connaissons encore aujourd’hui.

Il n’est donc guère étonnant qu’à Gembloux les mêmes cloches servaient au culte et aux besoins civils.

Illustration : La construction de l’abbaye, dessin commandé par l’abbé Antoine Papin, XVIe s., dans La Geste des abbés de Gembloux, par Jean-Paul Straus, éditée par le Cercle royal ‘Art et Histoire’ de Gembloux, 2012, p. 29 – article Manu Delsaute 

Les cloches de Gembloux sonnent pour le personnel soignant … et les autres (16)

Lundi 6 avril. Sonnerie des quatre plus grosses cloches pour ce soir. Ré-mi-fa#-la, les plus anciennes du beffroi. Petit exercice préparatoire vers ce qui nous attend plus tard cette semaine avec Pâques.

Les cloches, instruments du pouvoir.

 

Si les cloches suscitent la convoitise pour leur métal, elles l’ont fait aussi à titre de symbole du pouvoir.
En effet, historiquement, les messages étaient passés à la population au moyen des cloches. Le droit de les sonner appartenait à l’autorité.

Associées à l’horloge, elles indiquaient l’heure et rythmaient donc la journée de travail. Pas question d’horloge personnelle. Il existait une horloge de ville qui donnait l’heure pour tous, à de rares exceptions près. Les cloches annonçaient aussi la fermeture des portes, les réjouissances, le couvre-feu, les dangers… On leur obéissait. Leur rôle utilitaire était indéniable.

Elles ont donc eu un rôle social, sociétal, que les moyens de communication modernes ont progressivement fait évoluer. L’autorité use maintenant d’autres canaux pour faire connaître ses décisions et gérer le quotidien de la collectivité.

A côté du pouvoir civil de l’époque existait aussi l’Église qui appelait ses fidèles au son des cloches et exerçait aussi un pouvoir, qui pouvait d’ailleurs se confondre. Ceci engendra des rivalités entre autorités civiles et religieuses en bien des endroits.

L’apogée de ces conflits peut être trouvée à la Révolution française où l’on retira une multitude de cloches pour faire taire la voix de l’Église. C’est ce qui conduit à considérer que les cloches datant d’avant cette époque et qui existent encore sont de grande valeur : elles ont en effet traversé la période révolutionnaire et la Seconde Guerre mondiale pour parvenir jusqu’à nous.

Illustration : la girouette du beffroi avec les trois clés faisant partie des armoiries de la Ville. Source : Guy Focant, Région wallonne – article Manu Delsaute